mercredi 21 mai 2014

IDA

La bande-annonce est belle, mais elle en dit bien trop, bien, bien trop. Sans doute parce qu'il ne peut en être autrement, tant le récit est serré : le film prend son temps ; pourtant, il n'y a pas un plan, pas un mot, pas une information qui ne soit essentiel.le.


 
C'est un film en noir et blanc, ou plutôt en nuances de gris (sans allusion de ma part au fort peu intéressant livre à succès). Au début, je me suis demandé ce que cela apportait : j'aurais aimé voir les couleurs ténues de cette Pologne marquée par le communisme, de ce Jésus repeint, des yeux d'Ida la rousse, et la lumière de la neige traversant la forêt. J'aime beaucoup le noir et blanc, mais là, pour une fois, je me suis questionnée : la balance penchait-elle du côté de l'enrichissement (des traits, des contrastes), ou de l'appauvrissement frustrant ?
 

Précisément, les deux effets se rejoignent dans ce film, tant le monde se doit d'y devenir minimaliste, rétréci. Il semble contenir, retenir, parfois in extremis, dans son cadre écrasant, les trajectoires hasardeuses et cahotantes de personnages pris dans les contradictions d'un pays agité de forces adverses, entre judaïsme et catholicisme, communisme et concerts de jazz, campagnes désertiques et souvenirs glaçants, désir de se souvenir et désir d'oublier, de s'oublier. Entre violence extériorisée et quête de paix intime. 
 
 
A la clé, une réflexion profonde : qu'est-ce qui nous élargit (dans le sens propre, et dans le sens argotique du terme), qu'est-ce qui nous enferme ? Pas toujours ce que l'on croit. 
 
Mais avec tout cela, rassurez-vous, je n'ai encore rien dit. Et je ne dirai pas grand chose de plus, surtout pas du parcours d'Ida. 
Reste que la bande-son est sublime, et le film bouleversant, sombre mais pas désespérant ; souriant même par moments, grâce au fragile équilibre qui s'instaure entre les deux extrémités de la tragédie. Que la langue y est belle, comme toutes les langues de l'Est, et que la version originale sous-titrée est accessible à tous les lecteurs tant les dialogues sont parcimonieux. 

Pas de bande-annonce ici, donc, mais un extrait qui en dit peu et qui plonge bien dans l'atmosphère du film : 



Et puis les deux actrices de Pawel Pawlikowski. Celle qui joue Ida, Agata Trzebuchowska, est bien sûr excellente ; mais la tante, Wanda, interprétée par Agata Kulesza, est époustouflante, magnifique, poignante. Voilà une actrice qui vous prend au ventre et à la gorge. Une grande performance qui je l'espère marquera le commencement d'une filmographie plus abondante.

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