J'ai repoussé le départ jusqu'à risquer de rater mon vol international.
J'ai eu le mal du pays qui n'était pas le mien. Je serais restée ad vitam aeternam dans cette grande île de 160 km2 et de quelques milliers d'habitants.
PLAKA
Je suis arrivée le soir à Plaka. J'avais réservé une chambre d'Archondoula studio, louée par Stavros, bourru mais très cool sur les modalités et les imprévus. Chambre petite et blanche, parfaite ; douche cycladique, grande terrasse dépouillée donnant sur la mer.
Chaque rue de Plaka est une petite pépite. Quand je croise une vieille dame, nous entonnons en même temps, un "kalispera" pour moi, et souvent un "yaasss" pour elle ; entendant mon entame, elle mue la sienne en "kalispera".
Je suis aussitôt allée marcher, pour le coucher du soleil, parmi les chèvres, jusqu'à la butte du Profitis Ilias, où on a trouvé la Vénus de Milo : verger en friche, petite chapelle, vue sur la mer. La beauté des Cyclades est trop naturelle pour se faire écrasante.
Puis le théâtre antique qui jouxtait le champ, avec ses frontispices de toute beauté, m'a offert une découverte vivante : une répétition.
Je ne sais pas pourquoi ce pays a été si généreux avec moi, mais je l'avais pressenti. Je prends, je prends, un peu plus incrédule chaque jour, hésitant de plus en plus à penser que le jour suivant ne pourra pas égaler celui-ci, puisque chaque nouvelle journée me détrompe.
Le premier matin, j'ai fait du stop (Milos est grande, et les endroits les plus intéressants assez excentrés), une famille allait nettoyer une plage, j'ai suivi, j'ai rencontré Marion, une française, son mari grec, Nicholas, qui vit depuis des années sur l'île et s'y promène sans se lasser, découvrant toujours des nouveautés, et Julia ; ces deux derniers professeurs de musique à l'école municipale de Plaka.
Dès le premier soir, nous avons pris nos habitudes au café de la place : assiette commune de frites succulentes et bières, servies par un patron génial, pas très à cheval sur les conventions ni sur l'argent, sans doute parce que j'étais avec des habitués ^^.
La terrasse :
de l'autre côté, il y avait l'école de musique d'où sortaient de jeunes voix, et le petit musée archéologique, avec ses œuvres accessibles aux promeneurs :
Julia m'a hébergée le dernier soir pour que je reste plus longtemps ; le mari de Marion nous a emmenées à Sarakyniko en pleine nuit, et aussi voir les carrières avec les éclairages nocturnes. Il m'a raconté mille choses passionnantes.
Ils se sont mariés à Pollonia, devant la chapelle du port qui fait 3 mètres carrés, avec tous leurs amis sur un bateau. Je me suis sentie beaucoup moins anti-mariage, soudain. ^^
Sans eux, ce voyage n'aurait rien eu à voir.
J'ai aussi rencontré Dimitris Tsirigotis, un photographe de talent, qui m'a emmenée dans une séance paysage au petit matin. Il a son atelier/boutique à côté de l'église de Korfiatissa, d'où on contemple à Plaka le coucher du soleil si on ne monte pas jusqu'au Kastro.
Je suis repartie depuis un aéroport émouvant : un hall, une petite tour, pas de boutique ; marcher dans les herbes odorantes fouettées de vent pour rejoindre le petit avion, quelques chèvres encore en vue. Et bien sûr, mon voisin de vol était une autre personne qui m'avait prise en stop.
Conseils pour Milos (et restez, restez, une semaine minimum)
FIROPOTAMOS : là encore, seule au paradis dans une explosion de couleurs. Là encore, marcher longtemps, d'un lacet à l'autre où passent les camions des carrières, et sentir qu'on approche :
FYRIPLAKA : la plage multicolore... Du monde avant le gros rocher, plus personne après. Seule sous le jaune, le rouge, l'ocre, le rose, le blanc, le vert ; sur le sable gris argent, seule encore dans l'eau parfaite et très fraîche. J'ai pris des photos de détail, toutes perdues... Il ne me reste que celle-ci :
De près, les couleurs sont époustouflantes.
Ce que je conseillerais pour Milos , concernant la petite partie que j'ai explorée
- Y aller en mai, entre le 10 et le 20 par exemple.
- Fuir Adamas sitôt arrivé.e et ne plus y mettre les pieds.
- Faire du stop.
- Prévoir de nombreuses déambulations et soirées à Plaka, pour admirer le soir près de l'église de Korfiatissa et du Kastro, aller jusqu'au théâtre, acheter un bijou local dans les boutiques ouvertes tard, puis dîner dans un restaurant chaleureux comme Archondoula, où la patronne vous reconnaît le 2e soir, s'assoit avec vous...
- Venir aussi à Plaka en journée, pour voir le petit musée archéologique, traîner sur la place et dans la ruelle, puis descendre jusqu'à Klima pour admirer les maisons troglodytes et les syrmatas (garages à bateau) en passant par le Profitis Ilias et le théâtre romain.
- Acheter un bijou-souvenir fabriqué sur place avec une des roches de l'île (un bracelet poids plume en lave blanche et obsidienne noire, par exemple).
- Aller à Sarakiniko : pas une calanque : un monde de coulées blanches, poudreuses, râpeuses, rondes. Y aller une nuit de grande lune, rester seul.e dans cet univers surnaturel ; y revenir au petit matin, arpenter par cercles pour se gorger de toutes ces formes, se baigner dans l'eau pure et filmer les crabes. Eviter la journée, surtout en été.
- A Pollonia : manger chez Arménaki, et surtout ne pas manquer la pâtisserie Kivotos ton Gevseon à partir de la mi-mai, de l'avis des locaux un lieu de délices dont je n'ai pas pu profiter, puisque je suis repartie juste avant l'ouverture.
- Longer toute la côte nord à pied, de Pollonia jusqu'à Firopotamos, en restant au plus près de la mer ; de préférence le matin.
- Aller voir les carrières, spectaculaires (et toujours en activité, donc à éviter si vous craignez la poussière).
A Milos il y a de l'obsidienne, du kaolin, du plâtre, du soufre, de la permite, de la bentonite, du manganèse... L'économie minière est encore active, aussi l'île a-t-elle une vraie vie en dehors du tourisme et ne dévoue pas tout à ça, ce qui est grandement appréciable : aucune impression de se trouver dans un monde figé pour complaire au visiteur.
Les côtes sont à couper le souffle, aussi, même si c'est l'attrape-touristes par excellence, je conseille vivement d'en faire le tour en bateau, avec le bateau le plus petit possible, voire avec un local - et là aussi, j'ai pu, parce que... j'ai été prise en stop par ledit local, près d'Adamas, en allant à Fyriplaka. Le stop, c'est la vie ! Surtout dans une île grecque restée authentique : zéro insécurité, zéro machisme. Personne ne ferme sa porte, et si on vous drague, c'est simplement, franchement, et sans insistance si la proposition est éconduite.
C'était si beau, ce tour côtier, que je vous fais un petit panorama photo dans un article à part.
D'une manière générale, j'ai remarqué des réactions de sympathie quand j'annonce être française, sans doute parce que les touristes français sont ceux qui marchent le plus et râlent le moins, apparemment, ici en tout cas ; les plus âgés parlent quelques mots de français ; les jeunes parlent bien anglais.
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