jeudi 25 février 2021

L'Amour des hommes, de Mehdi Ben Attia, avec Hafsia Herzi

De ce film, sorti en 2017, j'ai tout aimé. 

 


Le titre, ce qu'il évoque et ce qu'il promet. 

L’héroïne, interprétée par Hafsia Herzi (La Graine et le mulet, Française, Tu mérites un amour, …). Impératrice précaire dont on tombe immédiatement amoureux. 

 

 

Le rythme, tranquille mais pas mou ; plans fixes qui prennent leur temps, silences rompus par un déclencheur ou un autre. 

La justesse des dialogues, économes et directs ; l’intensité des échanges.

Les lumières et les couleurs de Tunis ; les sonorités de l’arabe tunisien mêlé au français ; les cigales, le vent.  

Les sourires, et les moments musicaux composés par Karol Beffa.

Les intérieurs atemporels ; la séquence finale à travers la ville.

L’entremêlement de l’image fixe et de l’image mobile. 

 

Le comportement de la caméra ; les plans, les angles, les cadrages sont toujours comme spontanément parfaits ; toute cette beauté ne sombre jamais dans l'esthétisme figé.

La mise en accusation - sans caricature, sans fard - de l’agressivité des hommes envers une femme qui tente de vivre librement ; la manière dont la menace ne se laisse jamais longtemps oublier, mais se voit énergiquement repoussée. 


 

Regarder une femme regarder des hommes et franchir certaines limites du métier (toucher le modèle, voire le désirer ouvertement) sans jamais pourtant donner l’impression d’une intrusion malsaine, ni de sa part ni de la nôtre.


Ce trajet funambule de la liberté, entre carcans et pertes dangereuses de contrôle, esquissé en quelques scènes resserrées.

La subtilité, tout le temps et pour tout : des individualités, des palettes émotionnelles, du jeu. 

Le développement de l'inversion - grisante mais partiellement illusoire - de la hiérarchie genrée trop fréquente entre artiste en action et modèle modelable et sans force.

 

Cette tentative de prise de pouvoir n'est clairement qu'un premier pas, un renversement fructueux pour changer les repères, mais risqué et temporaire : pas un équilibre. 

Constater que chaque personnage, selon sa violence, son orgueil, son éducation, sa finesse humaine, est à un point plus ou moins éloigné de cet équilibre. Les femmes comme les hommes, les violents comme les doux. Toujours subtil, oh oui. 

La manière dont le film révèle combien les hommes deviennent désirables quand leur désir n’est plus de conquérir un corps mais d’habiter le leur, et dont les femmes peuvent exprimer  simplement et franchement leur désir. 

La finesse du premier modèle, joué par Karim Ait M’Hand (à voir aussi dans L’Armée du salut). 

Et enfin, last but not least, le travail photographique d’Amel Guellaty que vous avez pu admirer dans ce post (son Instagram).  

Voilà, que dire de plus sinon que j'espère vous avoir donné envie de le voir, pour, peut-être, en débattre ici ou sur les réseaux !

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