Pour ce cimetière mythique, j'ai voulu surtout de l'anonymat, de la lumière, des angles intimes ou imprévus, en pensant au dernier chapitre des Misérables, dans lequel Hugo écrit :
"Il y a, au cimetière du Père-Lachaise, aux environs de la fosse
commune, loin du quartier élégant de cette ville des sépulcres, loin de
tous ces tombeaux de fantaisie qui étalent en présence de l’éternité les
hideuses modes de la mort, dans un angle désert, le long d’un vieux
mur, sous un grand if auquel grimpent les liserons, parmi les chiendents
et les mousses, une pierre. Cette pierre n’est pas plus exempte que les
autres des lèpres du temps, de la moisissure
du lichen, et des fientes d’oiseaux. L’eau la verdit, l’air la noircit.
Elle n’est voisine d’aucun sentier, et l’on n’aime pas à aller de ce
côté-là, parce que l’herbe est haute et qu’on a tout de suite les pieds
mouillés. Quand il y a un peu de soleil, les lézards y viennent. Il y a,
tout autour, un frémissement de folles avoines. Au printemps, les
fauvettes chantent dans l’arbre."
Ici se mêlent donc les « hideuses
modes de la mort » et
l'émouvante fragilité des tombes qui retournent peu à peu à
l'oublieux état sauvage ; les pierres anonymées par l'usure et les
sculptures bouleversantes qui tentent de lancer la douleur des
martyrs à la face du ciel ; le marbre blanc et le bronze
rongé ; la finesse et le mauvais goût ; les fleurs trop
sages et les herbes folles ; la vie enfin, partout dans ce
royaume des morts. Parmi ceux que les touristes oublient du regard ou
vénèrent frénétiquement, nous redécouvrons l'éphémère de la
vie, et savourons d'autant mieux les plaisirs doux de cette oasis de
calme dans Paris, près de quelques immortels qui nous ont enrichis de leur pensée, leur art, leur sacrifice, et que nous osons de leur
mort visiter en intimes ; près aussi de tous ceux qui, comme nous,
n'ont fait que passer.
Les sculpteurs ont beau s'en donner à coeur joie, c'est encore la Nature qui rend les plus beaux hommages... Un merle sur la tombe d'Apollinaire, un rosier fantaisiste, des faisceaux de lumière, des arbres, de la mousse...
Bonne promenade.
La philosophie, en revanche...
2 commentaires:
Oh oui, ce lieu est une mine !
Je trouve tout particulièrement réussie la photo numéro 10, avec son jeu de profondeur et de surimpression, c'est très chouette !
Que de souvenirs évoquent ces photos...
J'ai visité le lieu (une partie !) avec un historien spécialiste des cimetières de la région parisienne.
Il s"appelle Landru (si, si) Philippe de son prénom. C'était captivant.
Son site (publicité gratuite) :
http://www.landrucimetieres.fr
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